Marc-Antoine Granger « La police administrative augmentée dans la jurisprudence récente du Conseil constitutionnel »

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Publié le 4 novembre 2025 Mis à jour le 4 novembre 2025
Date(s)

le 30 octobre 2025

Marc-Antoine Granger
« La police administrative augmentée dans la jurisprudence récente du Conseil constitutionnel », RFDC, n° 143, septembre 2025, pp. 783-784.

Dossier coordonné par Pauline Türk tiré des actes du Colloque annuel de l'AFDC - Commission de la Jeune recherche constitutionnelle (Université Côte d'Azur, CERDACFF, 30 novembre 2023). Direction scientifique : Tao Hoeffner, Jean de St Sernin, Célia Tedjini


« L’idée d’un État garant de la sécurité est fort ancienne et suffisamment connue pour ne pas y insister. Tout le monde a ses classiques à l’esprit. En droit positif, l’affirmation apparaît plus ou moins explicitement, ici dans l’écrit constitutionnel, là dans la loi ordinaire. Au niveau constitutionnel, citons ces mots « défendre les actions nuisibles à la société » figurant à l’article 5 de la Déclaration de 1789, souvent ignorés, encore si peu exploités par le Conseil constitutionnel, alors qu’ils traduisent le devoir de l’État d’assurer la sécurité. Ces mots doivent être lus à la lumière de l’article 12 de la même Déclaration qui, sur le plan institutionnel, prévoit que « la garantie des droits de l’Homme et du citoyen nécessite une force publique : cette force est donc instituée pour l’avantage de tous, et non pour l’utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée ». Au niveau législatif, le second alinéa de l’article L. 111-1 du Code de la sécurité intérieure (CSI), issu des dispositions de la loi Pasqua du 21 janvier 1995, mérite d’être rapporté puisqu’il dispose – en des termes dépourvus d’ambiguïté – que « l’État a le devoir d’assurer la sécurité en veillant, sur l’ensemble du territoire de la République, à la défense des institutions et des intérêts nationaux, au respect des lois, au maintien de la paix et de l’ordre publics, à la protection des personnes et des biens ».

Or, dans un monde qui ne cesse d’être dangereux, garantir un niveau de sécurité optimal – à défaut de pouvoir être absolu – relève du défi. Les menaces s’amplifient, se diversifient et s’expriment désormais dans un contexte marqué par « la brutalisation de la société ». On se souvient des violences commises en marge du mouvement des « gilets jaunes » ou des contestations contre la réforme des retraites, de l’épisode de violences urbaines du 27 juin au 7 juillet 2023, à la suite du décès à Nanterre du jeune Nahel, mortellement blessé par le tir d’un policier lors d’un contrôle routier, des événements de Crépol en novembre 2023, où le festif devient tragique sous l’effet d’un groupe d’individus armés de couteaux et de parpaings, ou, plus récemment, de la disparition, le 5 avril 2024, du collégien Shemseddine du fait des violences commises en réunion à son encontre aux abords de son établissement scolaire. À ces menaces du quotidien, s’ajoutent celles de haute intensité, susceptibles d’affecter la vie de la Nation, à l’instar des cyberattaques ou du terrorisme, qu’il soit rudimentaire, telle l’attaque au couteau, ou plus sophistiqué, comme c’est le cas du terrorisme NRBC-E, c’est-à-dire nucléaire, radiologique, biologique, chimique et par explosifs.

Pour relever ces défis sécuritaires, la trajectoire suivie par les pouvoirs publics, depuis la fin des années 1970, est celle du renforcement des moyens humains, juridiques, budgétaires et matériels des forces de sécurité intérieure. Parmi ces initiatives, et afin d’accroître les capacités de l’Homme par le non-humain non vivant (qui se distingue du non-humain vivant, c’est-à-dire des animaux, « êtres vivants doués de sensibilité », selon la lettre de l’article 515-14 du Code civil), le législateur renforce la police administrative augmentée, c’est-à-dire autorise l’utilisation des technologies de sécurité aux fins de sauvegarder l’ordre public et de prévenir les infractions. Les finalités de la police administrative demeurent, les moyens évoluent. »

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